Je crois que je n’avais pas ressenti ça depuis ma première visite chez Spring. Une micro-adresse, petite salle à l’écart des rues passantes des Halles, un décor joliment asiatisant, couverts et vaisselle de la même farine, c'est-à-dire laqués, épurés et sexy, et tout là-bas, derrière la vitre et la porte à croisillons, un petit bout de chef qui s’agite, presque seul (en fait, ils sont deux sur 4 m2). Elle est blonde, a fait ses classes à l’Astrance (trois étoiles tout de même), a bourlingué en Chine plus que de raison pour finalement revenir partager ses plaisirs de bouche en plein cœur de Paris. Une chose me frappe quand je la regarde cuisiner, de loin : un sourire doux comme une brume matinale qui ne quitte pas son visage.
Le restaurant a ouvert la semaine dernière et déjà il s’annonce comme la prochaine coqueluche des foodies de la capitale. On va vous en rabattre les oreilles ! Le jour de mon passage, au moins 4 critiques dans la salle, tous arborant le petit sourire en coin de ceux qui ont mis la main sur un diamant au milieu d’un tas de charbon.
Et il y a de quoi. Car la cuisine d’Adeline est bouleversante de clarté et de talent. Un habile mélange de saveurs et produits au confluent de l’occident et de l’orient extrême, à l’image de ces « Crevettes du Mozambique, émulsion d’ail des ours », subtiles, délicates, jouant du croquant, tout juste caressé d’une larme parfumée et mousseuse. Ou de ce « Canard de Challans sur aubergines sautées au soja noir », à la cuisson parfaitement maîtrisée, tendre à la peau croustillante, sur deux tranches d’aubergine aux saveurs douces-amères inconnues. Un summum de simplicité maline. Même l’amuse-bouche, un « Tofu sauté à la pâte de soja » vous sidère par sa limpidité gracieuse et saisissante.
Et c’est vrai qu’elle est là la limpidité dans l’assiette, le plat travaillé jusqu’à l’épure, des saveurs, des textures, sans jamais rien d’intello surjoué. Une cuisine de l’instant, forcément, suivant l’inspiration du jour et les produits de saison. Une cuisine parlant directement aux sens. Noble et sensuelle. Exquise et légère comme un premier baiser.
Le coup de grâce ? Accompagnez votre repas au thé, on vous les sélectionnera l’un après l’autre, ce sera beau, chaud et bouleversant les perspectives habituelles. Comme ce thé noir Pu Er (Yun Nan) servi avec le canard. De la terre, de l’humus, du gibier, du sang, le tout renvoyant en boucle aux instincts animaux dans une harmonie bluffante. Ou encore ce thé vert presque transparent qui conclura notre repas, au parfum enivrant de Jasmin et de Lilas Blanc. Diabolique.
En sortant, ravi, j’avais le sentiment d’assister en direct à l’éclosion d’un nouveau bourgeon printanier dans le ventre de Paris. C’est de saison me direz-vous...
yam'Tcha
4, rue Sauval
75001 Paris
Téléphone : 01 40 26 08 07
Fermé Lundi et Mardi
Menu déjeuner à 30 €
Menu Découverte à 45 €
Menu Dégustation à 65 €
On en parle, déjà, chez François et chez Bruno. Et ce n’est pas fini…
Plus de photos de yam'Tcha, ici.
Mon impression : fluide, netteté, une combinaison paradoxale du chimique/naturelle, juste à la frontière, là où coulent les douces rivières, à l'aube ! Ma sensation : entrer dans une piscine...et nager tranquillement sous le son d'une grande musique symphonique...Ma vision : la publicité de Dior, j'Adore, baignant dans l'or crémeux d'une chantilly de saveurs particulières..Ce que tu en dis, est pour ma part, perçu comme une réussite harmonieuse et condensée d'espoir!
Rédigé par : Mamsand | 31 mars 2009 à 10:34
C'est à ce moment-là que j'éprouve le regret de ne pas vivre à Paris..
Rédigé par : Esther | 31 mars 2009 à 14:01
c'est drôle, à lire tous les blogs art de vivre&fooding, j'ai l'impression que la première semaine de ce restaurant n'a vu passer que des critiques. j'imagine tout ce petit monde en train de shooter leur assiette... mais pour notre plus grand plaisir. donc merci
Rédigé par : la flore et la faune | 31 mars 2009 à 16:27
Sure ! My next "diner in paris" will be @ Yam'tcha !
Rédigé par : Pepo Fox | 03 avril 2009 à 06:01
Argh, c'est complet pour ce soir (je pouvais m'en douter)
Regrets éternels, je n'aurai sans doute pas le temps d'y aller avant mon départ...
Rédigé par : gé | 16 avril 2009 à 18:44
Ah, nous, on a eu la chance d'y diner vendredi dernier ! C'est toujours un peu angoissant de voir une telle unanimité des critiques, mais on n'a pas été déçus du tout. Des saveurs bien affirmées dans des mélanges réussis (foie gras poëlé et asperges, rouget et cresson, ...). Et grande réussite des accords de thés.
Rédigé par : Ariane | 16 avril 2009 à 22:07
Pas hyper bon marché tout de même...
Rédigé par : Cécile de Quoide9 | 21 avril 2009 à 03:19
Testé et approuvé ce midi !
Rédigé par : Petite Cervoise | 02 mai 2009 à 20:02
Les crevettes du Mozambique sont accompagnées de tomates cœur de bœuf absolument délicieuses. Subtile alliance. Une petite pointe d'aneth pour relever le tout. Et le parfum du Jasmin, qui rappelle ce leitmotiv de l'œuf en fin de repas à l'Astrance.
Un cochon de lait, 6-7 kg très tendre sous lequel on peut découvrir un mélange de saveurs très relevé: quelques aubergines fondantes, soja et poivre viennent donner son caractère à ce plat gourmand. Le tout accompagné d'un Crozes Hermitage qui fonctionne très bien avec le caractère poivré et épicé.
Des nectarines fondantes accompagnées de délicieuses petites fraises; la glace au gingembre donne son caractère à ce dessert très léger.
Bravo Adeline pour ce début en fanfare! Parce que même si le Wok s'est arrêté quelques minutes aujourd'hui et qu'on a bien cru que ça ne repartirait pas...Adeline n'a pas perdu la face et a sû rebondir pour ne pas perdre une minute et rester toujours au top!
Rédigé par : Guillaume | 31 juillet 2009 à 15:40
Mais comment font-ils à 4 dans cette micro-cuisine pour sortir ces plats qui par leurs accords subtils m'ont transportée très loin ?
Très impressionnée donc et subjuguée par la cuisine d'Adeline Grattard, j'ai hâte d'y retourner de la découvrir à d'autres saisons!
Rédigé par : Topsy | 08 avril 2011 à 10:22