Il y a quelque chose de jouissif dans l’art du contrepied. Un snobisme bien parisien à pratiquer le contretemps, comme d’aller dîner un soir d’automne dans un des restaurants de Paris les plus réputés pour sa terrasse estivale. Remontons les siècle vers ce pavillon de chasse de Louis XIV (1670), logé dans une boucle tranquille au bas des Champs-Elysées, en passant par le Café du Cirque (1842) et attablons-nous un instant sous les colonnades Grand Siècle de Laurent. On ne vient pas chercher ici la moindre once de modernité mais le calme, le luxe et… Une salle magnifique ouverte sur un jardin, des tables aux nappes lourdes et dressées d’argent, des chandelles, une moquette anglaise d’un vieux rose, des bouquets aux dimensions coloniales, voilà pour le décor. La clientèle se tient dans un chic discret, un peu troisième république, mâtinée de quelques tables japonaises qui goûtent ici une certaine idée de la gastronomie française. Service impressionnant, une nuée de jeunes filles en noir et blanc, et le maître des lieux, M. Philippe Bourguignon, orchestrant la manœuvre d’un sourire courtois. La bonne nouvelle, côté assiettes, c’est aussi qu’ici on « cuisine ». Si la cuisine d’assemblage, même fort bien faite vous lasse, vous trouverez ici le plaisir de goûter des plats dont on connaît la complexité de réalisation. Exemples du soir : une « Araignée de mer dans ses sucs en gelée, crème de fenouil » d’une fraîcheur iodée imparable, coulant sous la pointe anisée du fenouil puis un « Lièvre à la Royale cuisiné selon la recette du sénateur Couteaux, râble rôti, fusilli pour la sauce » de saison, puissant, pointu, sans lourdeur excessive, et enfin une « Coque de pommes caramélisées, mousseline au galanga » croquante et douce, indulgente comme une tape sur l’épaule, amicale. Alors certes, ça ne remue pas trop, c’est tranquille et réconfortant comme une demeure bourgeoise chez Balzac, certes à 200 € le dîner on n’en fait pas sa cantine (profitez alors de l’exceptionnel menu à 80 €) mais une maison comme Laurent, il faut se dire qu’on y part en voyage. Et franchement, cela vaut la peine, au moins une fois d’y poser ses malles.
Laurent
41, avenue Gabriel
75008 Paris
Téléphone : 01 42 25 00 39
Fermé le dimanche et le samedi au déjeuner
Menus à 80 € et 141 €
A la carte comptez autour de 200 €
Plus de photos du Laurent, ici.
"Je me retrouve à nouveau dans le jardin. Je continue l'allée Marcel Proust, sombrement. Des bancs vides. Je passe devant une belle et grande fontaine aux têtes de lion sculptées, avec trois putti pensifs, je frôle les bancs. Un pigeon funambulise sur le rebord d'un. Déjà beaucoup moins de monde, le jour faiblit.
Encore des pavillons... Il y en a plein au bas des Champs-Elysées, gros gâteaux roses, jaune, bleus, posés dans la verdure. On dirait qu'ils se cachent pour dégouliner. Le Pavillon Laurent est plus enfoui que le Lenôtre, un vrai château de sable, et qui s'effondre un peu plus lorsqu'on passe devant."
In: L'Homme qui arrêta d'écrire, Marc-Edouard Nabe, page 596 (marcedouardnabe.com)
ps - pas pu m'empêcher... et puis Nabe est dans la dernière sélection pour le Renaudot ;)
Rédigé par : tilly | 04 novembre 2010 à 13:42
Impressionnant de rapidité et de précision. Bravo Tilly !
Rédigé par : Thierry Richard | 04 novembre 2010 à 13:58
c'est étrange, moi quand je lis Balzac, je ne trouve pas que les demeures bourgeoises y soient tranquilles et réconfortantes....
Rédigé par : Paul Fredin | 04 novembre 2010 à 17:21
Bonjour,
Nous vous informons que vous avez enfin la possibilité de réaliser en ligne votre commande de clémentines sur www.naranjasdelmediterraneo.com.
Nous avons pris grand soin de nos champs durant toute l’année afin de vous offrir un produit d’une qualité exceptionnelle que vous pourrez savourez de nos terres à chez vous en 48/72 heures.
Essayez et vous pourrez gouter aux saveurs incomparables des fruits qui viennent d’être cueilli et qui ont muri au soleil de façon naturelle conservant ainsi toute sa vitamine C.
Merci beaucoup pour votre attention.
Humberto Martínez
Rédigé par : Humberto Martínez | 06 novembre 2010 à 04:34
Bonjour, c'est sûr qu'au vu du prix, on ne peut pas y aller tous les jours mais une fois dans sa vie pour marquer le coup, pourquoi pas? Ce qui est surtout agréable dans ce genre d'endroit, c'est le service, l'atmosphère feutrée, les serviettes en tissu (enfin j'espère), les couverts, etc. Bonne journée.
Rédigé par : dasola | 08 novembre 2010 à 14:02
Il est clair qu'Alain Pégouret maitrise son sujet. Un émerveillement gastronomique à chaque fois (et je ne parle pas des choix du sommelier !)
Rédigé par : David | 12 novembre 2010 à 13:21
Depuis un moment, je trouve que le Laurent est le meilleur restaurant de Paris. Meilleur emplacement, plus belle terrasse, salle à manger la plus agréable, gastronomie parfaite (le chef n'en fait pas des tonnes pour épater la galerie), cave et sommellerie de premier plan, service impeccable et bienveillant. Tiens, c'est bizarre, il n'a pas trois étoiles au Michelin...
http://bonvivantetplus.blogspot.com/
Rédigé par : Nicolas de Rouyn | 04 janvier 2011 à 09:58