Olivier Adam, prix Goncourt de la Nouvelle 2004 pour Passer l'hiver, a publié jeudi dernier aux Editions de l'Olivier son sixième roman, Des vents contraires.
Paul élève seul ses deux enfants depuis la disparition inexpliquée de sa femme. Pour tenter de mieux supporter son absence, il décide d'aller vivre à Saint-Malo, la ville de son enfance, et devient moniteur dans l'auto-école gérée par son frère. Là, il tente de reconstruire une vie pour lui, Manon, 5 ans, et Clément, 9 ans, dans l'ombre omniprésente de cette disparition, qui bien évidemment trouvera son explication à la fin du livre, même si, comme me l'a confié Olivier Adam, « le plus important est plutôt le temps qui s'écoule entre le premier choc de la disparition et le suivant, celui du dénouement, ce temps de latence qui est aussi du déni ».
Il s'agit d'un roman profondément touchant, où, outre le thème récurrent de l'absence cher au romancier, il explore la question de la paternité au quotidien, de l'amour d'un père pour ses enfants meurtris et de son désarroi devant des questions qui demeurent sans réponses. C'est qu'Olivier Adam a ce talent immense de rendre ses lecteurs si proches de ses personnages qu'ils s'y attachent immédiatement. Le choix du métier de moniteur d’auto-école choisi pour son personnage principal n’est pas non plus innocent car il s’agit, à l’image de l’agent immobilier de Richard Ford, d’une profession ouverte sur les autres, permettant les rencontres et le récit de destins parallèles. On trouvera également dans ce livre, servies par une langue impeccable, d'une netteté absolue, de superbes descriptions de la Côte d'Emeraude "hors saison" (le titre initial du livre), avec ses tempêtes, ses ciels lumineux, son froid glacial, son humidité permanente, comme autant de métaphores de la douleur sourde des personnages.
Bref, un roman à lire absolument !
J'ai pu rencontrer Olivier Adam le mois dernier pour un long entretien à paraître dans le Magazine des Livres et j'en ai profité pour lui poser quelques questions "hors champs", qui ont paru dans l'Express et que je vous livre aujourd’hui, portant essentiellement sur ses propres goûts littéraires.
Olivier Adam, quel est votre regard sur les jeunes écrivains français ?
J'ai écrit Je vais bien ne t'en fais pas il y a maintenant dix ans et tout a beaucoup changé depuis. Quand j'ai publié ce premier roman, c'était cool d'être un jeune écrivain, publié au Dilettante en plus! Mais, là, maintenant, c'est devenu beaucoup moins cool. On sait que la littérature française produit trop, on sait que beaucoup de jeunes écrivains font ça comme ils auraient fait autre chose. C'est vrai qu'un certain nombre d'écrivains très médiatiques n'ont pas joué un rôle très positif, en popularisant une image du jeune écrivain un peu branleur qui veut passer à la télé. Alors, après, c'est difficile de dire qu'on est totalement habité par ce qu'on fait, qu'on fait du mieux possible. Enfin bon, je dis ça, mais je ne suis pas forcément le mieux placé. Comme lecteur, je lis d'ailleurs beaucoup de littérature étrangère.
Justement, que trouve-t-on dans votre bibliothèque?
Enormément de littérature contemporaine et de littérature américaine, pas mal de littérature japonaise. Vous savez, j'ai commencé au Dilettante et là-bas il y avait une ascendance que j'appellerais verticale, Henri Calet, Georges Hyvernaud, Luc Dietrich, cette famille que Delbourg avait réunie sous le nom des Désemparés. Des écrivains un peu minimalistes, en dehors des autoroutes, une espèce de contre-littérature française. Ils étaient, même si j'ai lu mes classiques, bien sûr, mes vraies racines intimes, ma famille. Et puis, il y avait Eric Holder, ce passeur. Alors qu'ici, à L'Olivier, c'est plus une famille de contemporanéité, en dehors de la figure évidemment tutélaire de Raymond Carver pour lequel j'ai la dévotion qui convient. Beaucoup de littérature anglo-saxonne, donc, de Richard Ford à Cormac McCarthy en passant par Alice Munro, Jay McInerney, Pete Dexter, Rick Moody.
Et chez les Français?
Il y a avant tout deux figures, qui m'ont conduit vers cette littérature américaine-là, Jean-Paul Dubois et Philippe Djian. Modiano est un phare, une idole. J'adore aussi Annie Ernaux, Jean Rolin. Eric Holder a également beaucoup compté. De ma génération, je me sens proche, et littérairement et humainement, d'Arnaud Cathrine. Philippe Forest, aussi, m'intéresse beaucoup. Mais globalement, avec les écrivains de ma génération, c'est plus compliqué. A la fois parce que beaucoup d'entre eux vivent la littérature comme un sport de compétition et ne sont pas très amicaux, et que moi, les gens qui me parlent mal, je n'ai pas forcément envie de les lire. Je pense d'ailleurs qu'il ne faudrait jamais rencontrer les écrivains, en tout cas pas avant qu'ils soient apaisés, qu'ils aient réglé ces histoires d'ego. Ces dernières années, il y a eu tout une vague de littérature dite "fun" dans laquelle, je ne me reconnaissais pas. C'est vrai qu'avec Arnaud Cathrine et deux ou trois autres, on était les chiants, les pas drôles. On l'est toujours d'ailleurs! La France qui se lève tôt et qui ne va pas dans les soirées.
Quels sont les derniers livres que vous ayez beaucoup aimés?
Si je fais la liste des livres que j'ai vraiment adorés, il y a Chaos calme, de Sandro Veronesi, extraordinaire, Miles from nowhere, de Nami Mun, génial, Les "Fugitives" d'Alice Munro, qui m'a redonné l'envie d'écrire à la troisième personne, Comme Dieu le veut de Niccolo Ammaniti, encore un roman italien, un ou deux livres japonais dont les titres m'échappent et de la poésie, celle de Christophe Tarkos, d'Olivier Cadiot, des auteurs qui gravitaient autour d'Al Dante, comme celle de Philippe Jaccottet, qui est quelqu'un que j'admire infiniment.
La poésie, vous en écrivez vous-même?
J'en ai écrit. J'ai même commencé par ça. Enfin, j'ai plutôt commencé par écrire des chansons, puis de la poésie, puis des romans. Mes premières lectures ont été poétiques.
Des vents contraires
Olivier Adam
Editions de l’Olivier
254 pages – 20 €
C'est merveilleux, fantastique, extraodinaire, le portrait de cet homme que tu nous peinds ici avec tes lettres Gentleman, j'adore, si j'étais lui, je te proposerais d'être mon manager attitré, c'est une noble reconnaissance que tu lui fais ainsi!
Il a un petit air de Patrick Shaze, dans Point Break, et dans Ghost, si l'on va plus loin.
Merci pour tous ces renseignements Thierry!
Rédigé par : LoveSand | 12 janvier 2009 à 12:38
bonjour, je vous donne l'adresse du blog de Wrath, voir ici http://wrath.typepad.com/wrath/
je vais m'attarder sur votre blog, je viens de vous découvrir,
à bientôt,V.
Rédigé par : valy christine | 26 janvier 2009 à 10:53
Vous auriez pu au moins dire merci...
Sauf si votre question sur le blog "la lettrine" était tendancieuse et ironique.
Du coup, je n'ai plus envie de vous connaître, ni vous ni votre blog. Ah, oui, je sais, vous vous en passez très bien de ma modeste personne...
Allez, bonne journée.
Rédigé par : valy christine | 27 janvier 2009 à 09:51
Christine > Ohlala, comme vous y allez !
Je suis désolé mais je n'ai trouvé votre commentaire qu'hier soir et j'ai eu (malheureusement) un peu de travail ce matin. Je n'ai même pas encore eu le temps d'annoncer le vainqueur du DVD d'hier alors que les réponses étaient cloturées cette nuit à minuit. Pas de quoi se mettre dans un état pareil allons ! :-) Alors, oui, effectivement, je vous remercie pour le lien mais comme vous vous en doutez, je n'ai pas encore eu le temps d'aller voir ce dont il retournait. Merci encore.
Rédigé par : Thierry Richard | 27 janvier 2009 à 10:09