L’amitié masculine s’entretient aussi à coups de rituels.
Ainsi, en Automne, dans les premiers frimas parisiens, quand les chandails ressortent des armoires et que le froid du soir nous pique les joues de plus en plus tôt, nous aimons nous retrouver entre hommes, dans un bon vieux bistrot aux faux airs de 3ème République, pour savourer le temps qui passe autour de plats solides, forts-à-bras, totalement étrangers au genre féminin.
Ce soir donc, adieu le Bar vapeur au fenouil et les coquilles Saint-Jacques des dîners en amoureux, l’heure est au cochon dans tous ses états, aux abats qui luisent dans l’assiette, aux fromages de caractère et aux vins francs du collier.
Et c’est aux Zingots que ça se passe. Un ancien claque, mi-hall de gare, mi-bouillon 1900, au zinc interminable, larges banquettes et ardoises griffonnées qui font ralentir le pas à l’arrivée. Ici tout est « à l’ancienne », le décor bistrotier haut de plafond, la carte qui joue la tradition tripaillère et le patron, Gilles Bénard (également à la tête du fameux Ramulaud dans le XIème), tablier noir, verbe dru, lunettes autour du cou, un Gabin qui n’aurait fait de cinéma que dans son caboulot. Mais avec quel talent…
Car c’est un personnage Monsieur Gilles ! Il en impose et lui demander comment est préparé le "Roulé de tête de cochon de Bigorre" ou le "Craquant de pied de porc" est tout un art de diplomatie. Mais il a bon fond Monsieur Gilles, il aime son métier, sa cuisine, ses clients et sait les conseiller avec l'éloquence et la conviction des passionnés.
Sans lui nous serions peut-être passés à côté de ses divines huîtres « Utah Beach », les meilleures que j’ai jamais goûtées à ce jour, pas celles que l’on finit sur les côtes de l’Atlantique, non, les authentiques, les pures, celles qui ne quittent la Normandie que pour votre assiette, tendres, au petit goût de noisette, à peine iodées, tout en finesse.
Sans lui, nous n’aurions pas découvert ce Saint Chinian 99 au nom évocateur de cuvée « Une et Mille Nuits » du Domaine Canet Valette (la carte des vins est exceptionnelle de découvertes et de sagesse à moins de 30 €), si profond, dense et épicé qu’il vous réchauffe le cœur autant que le palais.
Sans ses explications je n’aurais peut-être pas misé sur le « Croustillant de joue de bœuf » qui se révéla un pur moment de bonheur égoïste, une viande fondante et craquante tout à la fois, relevée de la fraîcheur légèrement acidulée d’une salade d’herbes, si croquante en bouche.
C’est tout le charme de ces moments. Le froid s’installe peu à peu à l’extérieur et nous nous réfugions dans la douce chaleur du vin, la cuisine solide, large d’épaule, décomplexée de la diététique et le plaisir de la conversation. Nous avons nos sujets, les femmes bien-sûr, la politique aussi, le dernier livre qui nous a tenu éveillé, la vie qui passe, le Bas-Armagnac ou la Prune de Souillac du patron, et les plaisirs de la table, encore et toujours.
Aux Zingots les plats et les amis vous tutoient, et finalement, c’est ce que l’on cherche.
Aux Zingots
12, rue de la Fidélité
75010 PARIS
Tél. : 01 47 70 19 34
Comptez 45 € par personne.
Attention, tu affiches tes penchants homosexuels (solides, forts, cochon, abats, qui luisent, dru…) ! C’est un mois de Novembre très masculin. Mais le post est bien écrit et tu ne verses pas dans le François Simon. Je vais retourner au resto
Rédigé par : Le Chic Geek | 09 janvier 2007 à 20:08
Bon resto, patrons marrants, sympa, jolie salle..
Rédigé par : MOUTON NOIR | 01 février 2007 à 09:41
Quand je te dis qu'on va finir par se croiser !
Rédigé par : Caroline M | 09 mars 2007 à 16:47