Elle portait une minerve. Je ne l’ai remarquée que lorsque elle a ôté son manteau et débarrassé ses épaules d’une large écharpe qui la couvrait jusqu’au visage, au moment de se mettre à table donc. Cela donnait à son port de tête une allure altière, presque hautaine, le menton fièrement dressé vers l’avant, qui contrastait avec la candeur de son sourire juvénile.
Elle m’avait dit « vous verrez vous ne serez pas déçu ». Elle parlait avec enthousiasme de cette adresse qu’elle tenait à me faire découvrir, quelque temps après que la tourmente médiatique s’en soit finalement éloignée pour aller ailleurs butiner d’autres nouveautés. Elle parlait de ce bistrot ouvert en plein XVème par un ancien de chez Michel Bras et Pierre Gagnaire (Guillaume Delage fut longtemps chef du Gaya) et qu’elle fréquentait souvent. Elle n’eut pas à batailler pour me convaincre, quelques échos flatteurs l’ayant précédée ces six derniers mois. L’affaire était faite lorsque de surcroit j’appris par la bande que le nom du restaurant, Jadis, était un hommage à Antoine Blondin et à Monsieur Jadis, son double littéraire. Bon présage !
Elle but d’abord du vin blanc coulant d’une bouteille sur l’étiquette de laquelle on pouvait lire « Pourquoi pas ? » (Coteaux du Languedoc – 2007). C’était charmant.
Sur la table entre nous on apporta une « Crème d’épinard, jaune d’œuf et infusion glacée de légumes » d’un vert vif à la texture mi-liquide-mi-gelée soufflant la générosité de ses vapeurs végétales comme un potager de printemps, une « Poitrine de veau farcie, blettes et salsifis au jus » réveillant des souvenirs de chairs douces, opulentes et tendres sous les légumes presque confits s’évanouissant en bouche sur un simple claquement de langue, et enfin un « Chou pâtissier au pralin » fortiche, très années 50, avec une tenue et une familiarité certaine que Blondin n’aurait pas désavouées.
Des parfums de cuisine de jadis certes mais trempant la patte dans l’époque, assez maligne et délurée pour se glisser qui plus est dans un rapport qualité-prix étonnement aimable.
Seul véritable point noir de l’endroit, un volume sonore à la limite du déraisonnable, réchauffant l’atmosphère mais agressant les oreilles délicates. Allez-y alors, au choix, entre amis sachant se faire entendre, avec un raseur dont la conversation vire souvent au monologue ou une jeune femme qui, du coup, ne vous en voudra pas de plonger délicieusement dans son décolleté afin de vous rapprocher pour mieux l’entendre.
Pour ma part, effectivement, je ne fus pas déçu.
Jadis
208, rue de la Croix Nivert
75015 Paris
Téléphone : 01 45 57 73 20
Fermé le samedi midi et le dimanche
Menu à 32 €
Plus de photos de Jadis, ici.
Il fallait s'en douter, j'adore ton billet du 19 Mai Gentleman!
Au fait, j'ai été manger chez " Ma cousine ", dimanche, sur la place à Mmontmartre, tu connais?;)!
Rédigé par : Sand | 19 mai 2009 à 14:51
ça donne l'eau à la bouche mais j'irai en voisine plutôt qu'en admireuse de décolleté...
Rédigé par : Cécile de Quoide9 | 08 juin 2009 à 08:15