Etonnant comme certains ouvrages autobiographiques parlent au vécu du plus grand nombre. C’est le cas de ce Zizi the kid, dernier livre en date du talentueux journaliste et chroniqueur David Abiker. En s’attaquant à ce sujet si rarement traité qu’est l’éveil à la sexualité des enfants, c’est à travers sa propre expérience, sans tabous ni exhibitionnisme forcené, qu’il nous ramène tous à nos émois de petits garçons. Et c’est, il faut bien l’avouer, avec le plus grand des plaisirs que nous retrouvons à sa lecture ces moments, ces objets, ces petites filles ou ces amies de maman qui ont fait de notre enfance une usine à fantasmes, une avancée prudente vers des territoires inconnus, excitants autant que terrifiants.
Dans ce récit vif et alerte, l’auteur du Musée de l’homme nous fait partager ses souvenirs d’une sexualité balbutiante – on prend le petit David, dit Zizi the Kid, à six ans pour le lâcher à treize, à peine dégrossi, toujours plongé dans les affres de sa propre découverte – et en profite pour dresser en arrière plan le portrait d’une époque traversée par toute une génération. Une époque où l’on portait des pantalons à pattes d’eph qui grattaient les cuisses, des sous-pulls à col roulé et des Kickers, où les mères de familles avançaient leurs seins pointus en avant comme la proue d’un navire et dissimulaient leurs cuisses sous des jupes écossaises. Une époque où l’on pouvait encore s’émouvoir des pages centrales de Playboy, du « Lady Finger » du catalogue des 3 Suisses, d’une scène de sein nu dans Le sac de billes ou de la nudité équivoque des frites Végétaline.
Intemporelles en revanche, ces discussions de garçons sur le zizi (la taille et l’emploi), les premières frictions ambigües avec la sœur d’un copain ou la découverte des livres interdits dans la bibliothèque familiale. Evitant le vulgaire, David Abiker évoque dans Zizi the kid ces sentiments ingénus avec beaucoup de pudeur, de tendresse et un humour féroce.
Intelligemment, il ne masque pas ce qu’il y a d’angoisse, de perplexité, de honte contenue, de brutalité dans la découverte du sexe par un petit garçon de dix ans. Alors, peu à peu, le récit, découpé en courtes tranches de vie, délaisse le côté purement sexuel des frissons enfantins pour s’abandonner à une douce mélancolie. Celle de l’enfance, des copains, de l’insouciance et de tous les possibles.
Zizi the kid
David Abiker
Robert Laffont
204 pages - 15 €
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