Blanche, ma chère amie,
Saurez-vous me pardonner ? De cette nonchalance qui, je vous l’assure, n’a rien d’un désintérêt. De ce temps enfui, de cette lenteur qui parfois exaspère. Depuis notre dernière rencontre l’été a passé, les ciels d’un bleu parfait et la douceur des orages aussi. Voici des semaines que je tiens cette lettre en projet et jamais jusqu’à aujourd’hui je n’ai trouvé le courage de prendre la plume pour vous dire à quel point votre livre m’a touché.
Votre « Eloge du désir » n’a pas quitté ma poche une semaine durant. Je l’ai lu à petites gorgées, comme pour mieux en savourer tous les virages. Cette lente plongée dans les profondeurs du désir, cette exploration buissonnière et sans tabous de cette force motrice nécessaire et vitale si souvent négligée, abusée, mise à mal par le quotidien et les usages de notre temps.
« Vis comme tu penses, sinon tu finis par penser comme tu vis ». Vous aimez citer cette phrase que votre père vous répétait jadis comme un ultime vade-mecum, la ligne de fuite essentielle. Tout était là, déjà. Faire le clair en soi, laisser peu à peu percer ses aspirations les plus profondes, ce désir absolu et vrai qui n’est qu’en soi (et non pas dicté par les circonstances, l’air du temps ou les marchands du temple) et y consacrer sa vie.
Vous avez parcouru bien des mondes, des déserts, des couvents, des lieux de plaisirs, vous avez sondé bien des âmes – en commençant par la vôtre ce qui est souvent l’exercice le plus périlleux – et vous en êtes revenue avec un livre profond, sensible, sensuel, qui interroge nos destins et nos jours.
Vous voyez, chère Blanche, l’effet que votre livre a eu sur moi, combien j’en ai goûté chaque ligne, comme je m’y suis vu tendre un miroir à chaque page. Que voulez-vous ? On ne nourrit pas sa plume à l’encre des plaisirs sans prendre quelques risques. Comme celui de lire un livre dangereux, juste à cause de son titre. Un de ces livres qui vous ouvrent les yeux. Qui vous mettent en face de l’évidence : il faut vivre avant de mourir. Vivre pleinement et vivre selon ses désirs pour ne rien regretter.
« Il y a deux tragédies dans l’existence : ne pas parvenir à satisfaire tous ses désirs et parvenir à satisfaire tous ses désirs » écrivait Oscar Wilde. Comment lui donner tort ?
Bien à vous,
T
Un extrait ?
« Au cœur de notre propre énigme, se forment nos désirs les plus essentiels. Toutes les morales sont extérieures à nous. La seule éthique véritable est la fidélité à notre intégrité. Idéalement, notre vie devrait rayonner autour d’une évidence première qui nous porte. On peut passer sa vie à la chercher. Mais on acquiert une véritable liberté quand nos désirs ne sont pas mimétiques, mais essentiels. Seul le choix que nous faisons de nous-mêmes doit nous construire. Seule une certitude intérieure doit nous guider. Vivre intensément, c’est être soi-même. »
Whaou! Ben après avoir lu ça je crois que je ne vais rien oser écrire moi aujourd'hui...
Rédigé par : Mlle E | 18 octobre 2007 à 11:11
oh là là ! un vrai retour sur soi..une philosophie de vie . à lire .
Rédigé par : emilie | 18 octobre 2007 à 12:02
Merci à Blanche pour sa remise en question et à Thierry pour son acuité sensoriel qu'il nous fait si bien partager.
Rédigé par : Thaïs | 18 octobre 2007 à 12:16
Oh MY GOD ! Je me sens mAlE...Je vais mourir.
Rédigé par : Sand | 18 octobre 2007 à 12:29
Et vivre paisiblement c'est quoi?
Rédigé par : Sand | 19 octobre 2007 à 09:02
je file l'acheter et vous tient au courant...
Rédigé par : Falbalas | 19 octobre 2007 à 13:17
Lumière, chouette! J'ai trouvé la réponse à ma question : vivre paisiblement c'est être une Colombe Bleu pour ne faire qu'Un avec le ciel et la planète, comme ça, aucun souci, comme le Caméléon, on devient un beau et charmant néon. Bon week-end Monsieur le Gentleman!
Rédigé par : Sand | 20 octobre 2007 à 08:29
Ca y est j'ai parcouru votre blog de fond en comble. j'en déduis que vous aimez : manger, les femmes, l'élégance ; que vous avez une certaine sensibilité aux détails du quotidien. Je constate que vous avez un regard intelligent (dans le sens dynamique, enfin vous n'êtes pas comme de l'eau dans l'eau quoi!) sur ce qu'il se passe tout autour; que vous avez du style; que votre blog dans sa démarche ressemble pas mal à celui de François Simon -mais pourquoi pas. J'aime bien vos papiers dans Rue89 et enfin pour ce qui est du dernier billet sur votre blog, l'éloge que vous faites de "l'éloge du désir" m'a donné envie de lire le livre alors que le passage que vous citez m'a donné envie de le refermer. Alors que vous ne semblez pas aimer les poncifs comme j'ai pu le constater à l'occasion d'un de vos messages sur un autre blog, je suis surprise que de telles phrases qui me semblent pompeuses et vides de sens aient pu vous toucher. Enfin ne résumons pas un livre à quelques lignes, mais ce sont quand même celles que vous citez pour exemple. Cette accumulation de mots, essentiels, éthique véritable, évidence première, véritable (encore!) liberté, essentiels (encore encore!), pour finir par une phrase d'une bouffonnerie "vivre intensément c'est être soi même". Ah ba ça alors, ça déménage. Mais euh au fait, ça veut dire quoi au juste : Des désirs pas mimétiques mais essentiels. Ah ouais d'accord, je vois, essentiels, elle dit la dame Blanche. Il faut être dans la vérité vraie, ne passons pas à côté des choses simples et essentielles comme dans la pub couleur sépia, avec une musique larmoyante, où le petit garçon jouait au bord de la rivière avec un bout de bois. Enfin bref je trouve ça tarte et c'est tout le contraire de votre blog et de votre style. Vous me direz, les goûts et les couleurs...
EJ
PS : La citation de Wilde est bien
Rédigé par : emmanuelle | 20 octobre 2007 à 15:31
@ Emmanuelle : je me suis demandée à vous lire si vous n'aviez pas joué là le jeu tout simple de la pure provocation bravache ! En effet, même si un livre ne se résume pas à un extrait choisi arbitrairement par un lecteur en fonction de sa sensibilité, c'est aller beaucoup trop loin il me semble que de dire à l'auteur du billet "de telles phrases qui me semblent pompeuses et vides de sens aient pu vous toucher..." car alors clairement vous portez un jugement sur la pertinence de ce qu'il ressent. Le connaissez-vous si bien, voire mieux que lui même ne se connait, pour pouvoir décréter que se laisser toucher par ces mots là est en dessous de lui et décevant ? Pour ma part, je comprends à demi-mots qu'il s'agit surtout de ne suivre que ses propres désirs en sachant premièrement les identifer comme les siens purs et non pas ceux susciter à notre insu par les autres, notre éducation, notre société de consommation... Pas de mimétisme ici, à bannir absolument, mais plutôt une injonction à la Socrate "connais toit toi même" comme le préalable indispensable pour vivre Notre vie, Nos désirs etc... et quitter cette terre convaincu que nous avons vécu notre vie et pas celle d'un autre !
Rédigé par : gicerilla | 21 octobre 2007 à 16:32
Moi, qui suis bien loin de la litterature, la seule chose que je peux dire donc, et aussi, ne connaissant aucun de vous, à part peut-être quelques miettes de vos âmes, un peu mieux ressentie par les uns ou part les autres, tout dépend du contexte, des mots, des blogs donc, je parcours mes visites en fonction de mes sensations, j'en dépend plus ou moins par leur intensité et leur séduction qui m'est propre. Alors, tout ce que je peux dire, comme je le fais à mon habitude de fonctionnement naturel, c'est ceci : je me rappelle ma première réaction à cette lettre à Blanche, et seulement ça me faire dire ça : il se dégage de ces mots une si grande émotion, force, impacte, puissance, que je me fous complètement du reste, car c'était bien, c'était bon comme un tour d'adrénaline sur un grand 8, on monte ,on descend, on respire et c'est fini. Après, on pense certainement...intellectuellement, intelligemment, parfois même financièrement, mais finalement, avec tout le respect que je vous adresse à tous chers penseurs, moi, la seule chose à laquelle je rends hommage, donc à Monsieur le Gentleman, c'est : merci pour ce tour d'adrénaline en belle poésie. J'espère, un jour apprendre, arriver à aligner les mots aussi bien, dessiner aussi, créer quoi à force de miettes d'âme, d'échanges, de désirs pour partager l'amour électrique de cette adrénaline là. Pardon, si je me suis étalée au milieu mais je manque encore beaucoup de contrôle quand je suis touchée bien ou mal d'ailleurs...
Rédigé par : Sand | 21 octobre 2007 à 17:12
Gicerilla, je vous réponds bien que je trouve que ce soit très compliqué de dialoguer ainsi. Non ce n'était pas de la pure provocation. Oui je porte un jugement mais cela ne me pose aucun problème. Tous les jours, je porte des jugements sur plein de choses, je dis c'est bien, c'est mal, en ayant conscience que ça n'engage que moi mais ça m'engage. En l'occurrence je ne juge pas la pertinence du ressenti de l'auteur de ce billet, je lui exprime ma surprise et en revanche je juge cet extrait particulièrement pauvre en idées (ou alors des idées qui ne sont que des évidences, bien sur qu'il faut se connaître soi-même, c'est un peu naïf de dire qu'il faut suivre ses envies, ses désirs, ses opinions et pas celles des autres),pauvreté masquée par une écriture pompeuse (et pas particulièrement belle en plus) comme s'il fallait que la forme prenne le relais du vide. Par ailleurs je n'avais pas compris ces lignes comme vous et vous dites "suivre nos désirs et non pas ceux suscités par notre éducation ou notre société de consommation". Alors si ces lignes disent ça, je juge doublement. Car c'est un leurre de penser qu'on peut avoir des désirs "purs" (déjà le mot prête à discussion, puisque que vous opposez les désirs purs à ceux de la société, comme si la société était impure, tiens voilà un beau jugement de valeur, bref) tout homme est le produit de sa société, de son époque, les désirs n'existent pas ex-nihilo. Je suis ethnologue de formation et je suis toujours étonnée de ce discours que j'entends souvent sur la société qui pervertirait et sur la possibilité de s'en abstraire. De plus pourquoi penser que les désirs "purs" si toutefois il existait seraient supérieurs en qualité. Là encore c'est un jugement de valeur, c'est placer l'individu au dessus de la société, pourquoi pas d'ailleurs? Cette hiérarchisation n'est pas valable dans toutes les cultures ; elle l'est cependant dans la nôtre, que vous semblez par ailleurs condamner. Mais bon tout ça nous mène très loin.
Enfin dernier point, si j'ai écrit ce mot c'est parce que j'étais réellement étonnée étant donné que nous avions eu un précédent échange en aparté par mail, à l'occasion duquel l'auteur de ce billet me disait que j'avais eu quelques phrases qui n'étaient que des poncifs, choses que j'ai reconnue. C'est la franchise et la liberté d'expression de l'auteur qui m'ont donc attiré sur ce beau blog jusqu'à ce billet final qui m'a laissé sans voix tant il m'a surprise.
Mais c'est compliqué de vraiment développer un point de vue ainsi
Rédigé par : emmanuelle | 21 octobre 2007 à 18:34
" Sans voix " est bien l'expression la plus juste que m'a fait ce billet avant l'adrénaline de l'électro-choc, il m'a fallut plusieurs heures pour enfin..., bref, disons 24 heures chrono post, et oui, la sacré sensibilité sociale! C'est vrai que je ne pense pas que nous puissions y échapper purement parlant, nous sommes la société non? Mais, le désir lui est propre à l'individu batti je pense sur un statut sociale et s'en défaire est certainement le chemin de chacun tout au long de sa vie mais en atteindre une pureté, c'est plutôt la traverser pendant tout ces moments magiques du monde amoureux dont bien entendu le désir jusqu'au 7 ième ciel en aveugle social, mais après cette traversée, que reste-il? et bien la pensée, et elle ne peut être pure....merci beaucoup de tous ces commentaires enrichissants de pensées sociales!
Rédigé par : Sand | 22 octobre 2007 à 04:45
C'est étonnant cette façon qu'ont certains commentateurs de juger et d'évaluer la pertinence d'un billet. Bientôt ceux qui tiennent des blogs devront demander l'autorisation de publier sur des critères mal définis de "politiquement correct", de "poncif" ou autres paramètres.
Je trouve que l'intérêt des blogs réside justement dans la perception qu'ont les auteurs de faits poltiques, culturels ou autres.
Après on adhère ou pas à la sensibilité de l'auteur, à sa manière de l'écrire et de l'exprimer. Cela ne veut pas dire que l'on adhère en tout, à son jugement.
Je vais sur des blogs politiques dont les idées ne me correspondent pas mais j'adhère au stlyle du bloggueur, à sa façon d'écrire et à la pertinence de certains propos.
De la même façon, je viens sur ce blog car j'aime beaucoup la plume de Thierry, j'aime sa sensibilité qu'il parle de tableau, de livre ou d'assiette. Néanmoins, je ne me suis pas retrouvée dans son appréciation d'un livre.Et alors ? je le lui dirais sans pour cela dénigrer son jugement et le jour où je ferais de la provocation ce sera seulement de l'humour et si je sais, que ce sera perçu comme tel !
Tout cela pour redire, que j'ai aimé cette lettre et que même l'extrait a raisonné en moi de manière positive, au point que je vais lire ce livre.
PS : Le seul point où je suis vraiment et définitivement à l'opposé du "tenancier" de ce blog c'est sur son attachement au rugby mais là nul n'est pas parfait :-)
(mais bien rattrapé avec wilki !)
Rédigé par : Thaïs | 22 octobre 2007 à 09:40
Voilà, je m'absente pendant deux jours, je vous laisse seul(e)s aux commandes et voilà le résultat : un vrai débat qui s'engage ! Je devrais partir à la campagne plus souvent... Je comprends tout à fait que les jugements que je porte, mes coups de coeur, mes emballements ou mes coups de tête ne soient pas partagés par tous et c'est très bien ainsi. Je comprends qu'Emmanuelle ait son propre avis qui différe de ma position, je comprends que Sand suive ses sentiments plus que sa réflexion, que Gicerilla soit touchée par le "message" du livre fut-il "simpliste", que Falbalas et Emilie aient envie de lire le livre, que Thaïs ne soit pas toujours d'accord avec moi mais revienne régulièrement poser ses yeux ici. Je comprends tout cela et même, j'en suis heureux. Je ne prétends pas ici dispenser la voix de la sagesse, celle du bon goût universel ou du "In or Out" absolu. Je dis ce que je pense, ce que je ressens, et laisse chacun libre d'adhérer ou pas. Au fil des lignes, des sujets traités, ma seule ambition est que se dessine un portrait en creux qui permette à certain(e)s de s'y retrouver et d'accorder dès lors quelque crédit à mes propos, ce qui me semble être le propre de la critique.
Concernant plus directement le livre de Blanche, je serais plus mesuré encore : non ce n'est pas le livre de l'année mais il m'a réellement touché ; oui, on peut considérer son message comme simpliste (le livre est court) mais il me semble utile de se le remémorrer de temps en temps pour ne pas se perdre soi-même de vue ; oui, Blanche de Richemont a un style parfois un peu trop "lyrique" mais cela ne me dérange pas ; oui, on peut y retrouver de ci de là certains "poncifs" (et encore) mais franchement, où parle-t-on de désir dans la blogosphère ? Voilà.
En tout cas vraiment merci à tou(te)s pour vos contributions !
Rédigé par : Thierry Richard | 22 octobre 2007 à 10:13
Cher Richard Says,
Ce qui est sympa avec vous, c'est que je sais que le jour où j'aurai une question à poser à François Simon sur ses chroniques du plaisir (sur le vin, un décor, le décolleté d'une serveuse, qui sait ?), je sais que vous y répondrez à sa place. Très pro !
;-)
Je tente le coup dès son prochain billet.
Rédigé par : Benoît Wagner | 22 octobre 2007 à 13:07
bon je vais acheter ce livre et le lire pour pas mourir idiote -sur ce dernier point c'est pas gagné.
quant au coup de la pub sur le blog de Fs, je m'interroge de savoir si pas un peu gonflé? Mais pourquoi pas.
Comme disait Terrail, il n'y a rien de plus sérieux que le plaisir. Alors continuez.
Rédigé par : emmanuelle | 22 octobre 2007 à 13:50
Benoît > Cela pourrait bien marcher, on ne sait jamais ! Mais peut-être pas... Un conseil cependant, visez plutôt la catégorie "décolleté de la serveuse" ! ;-)
Emmanuelle > Je suis un garçon audacieux, que voulez-vous ?
Rédigé par : Thierry Richard | 22 octobre 2007 à 14:46
Franchement, tu assures Graave! hum!
Rédigé par : Sand | 22 octobre 2007 à 19:56
Ta note me donne envie de lire ce livre et de contempler son message.
Rédigé par : marsha | 23 octobre 2007 à 06:40