Elle est comme ses livres. Spontanée, sensible et dotée d’un charme terrible.
J’en avais, comme tout le monde, entendu parler. Je l’avais même lue par intermittence. Mais jamais vraiment rencontrée. Je l’avais tout juste croisée, vingt secondes en tout et pour tout, présentée par un ami commun entre deux verres de vin. Puis lui, elle et moi, nous étions passés à autre chose, poursuivant nos propres itinéraires.
Jusqu’à ces brefs échanges électroniques, quelques emails de trois lignes, des invitations, des dîners repoussés, la vie qui joue son rodéo et l’emploi du temps qui ne se plie à rien, des mois écoulés en flux et reflux successifs, de reportages anglo-saxons en séances photo, impossible d’y caler une rencontre. Mais la vie est comme ça, vous ne l’attendez plus et la voilà qui débarque en fanfare.
Jusqu’à donc cette invitation à déjeuner chez Ozu.
J’arrive en avance, elle est déjà là, dans le jardin, au téléphone avec son agent, interrompant brutalement sa conversation pour venir à ma rencontre, un franc sourire illuminant son visage blond. Et je comprends immédiatement que ce déjeuner sera un délice.
Etonnant endroit. Un restaurant japonais, en sous-sol, dans l’enceinte de l’aquarium du Trocadéro. On y débarque au débouché d’un long couloir, escorté de tambours japonais suspendus aux murs de pierre, dans une vaste salle de bois blond dont une immense paroi de verre laisse apparaître un aquarium géant d’un bleu tranchant où naviguent quelques bancs de poissons en rangs serrés et disciplinés. C’est beau, tranquille comme un bord de mer nordique, mais un peu rafraîchissant. De l’autre côté de la salle, une série d’armures de samouraï montent la garde dans des alcôves, et tout au fond, à côté du bar à Saké, un mur de pierre et de verre découvre la cuisine où les cuisiniers japonais, tout de noir vêtus, s’activent en silence, avec méthode.
Elle jubile. Ce restaurant, dans lequel Thierry Marx est partie prenante depuis peu, l’excite. Comme une enfant à la veille du goûter, elle salive et ne tient pas en place à l’idée de tâter de ces nourritures étranges, dont la carte brune, écrite en japonais et en français fait l’étalage. On décide de se laisser aller et de picorer à tout va afin de découvrir le maximum de saveurs nouvelles.
Démarrage en douceur avec un « Bar mi-cru mi-cuit et trois saveurs de navet, sauce soja au citron yuzu » servi sur une très belle ardoise d’un gris profond. Il s’en détache un large ruban de bar très mince, un petit monticule blanc surmonté d’une mousse bulleuse (c’est le bar cuit et son espuma) et une petite pyramide aztèque à trois étages, d’un blanc de perle (ce sont les navets). C’est d’une finesse incroyable, le bar cru est accompagné de petits œufs de poisson explosant en bouche comme autant de graines de grenade, le navet d’une fraîcheur de cascade en montagne. On poursuit sur les chapeaux de roue avec un « Croustillant de crabe mou karaage, vinaigrette au soja parfumée aux poivrons sansho ». C’est un choc. Pour qui n’a jamais goûté de soft shell crab, lâchez vos crayons, vos ordinateurs, vos enfants, vos téléphones et courez chez Ozu ! Imaginez-vous cela, un demi-crabe, à la carapace fine, servi avec pinces et pattes démesurément longues, le tout recouvert d’une pâte presque transparente, quasiment cristallisée par endroits, que l’on trempe tel quel dans la sauce de soja avant de le porter à sa bouche sans le décortiquer. C’est incroyable, une texture jamais vue, croquante et molle à la fois, une saveur douce avec des arômes d’agrumes, une tiédeur qui vous envahit le palais et le bruit de la carapace qui rompt sous la dent. Tout une aventure !
Ses yeux pétillent. Je comprends maintenant son insistance à venir ici. Et son goût du voyage, de la découverte. La conversation quitte souvent la table, file vers le passé de chacun, dévide la bobine des anciennes ambitions, des erreurs de jeunesse, revient sur un goût, une saveur, puis repart vers l’intime, les histoires, les anecdotes et les points de vue. Communs le plus souvent. Mais cela ne nous étonne pas.
Alors arrive, dans une magnifique pierre de lave noire, comme en remontée du temps vers les origines de l’humanité en des lieux mystérieux, le « Croustillant de turbot karaage, croquant au riz soufflé, sauce ponzu ». Et là encore, on reste pétrifié par la simplicité, le savoir-faire et la pureté de ce plat. Comme un haïku dans l’assiette. Suivront un « Filet de bœuf sur plaque chauffante toban », un « Urimaki de tempura de crevettes et cresson daikon cresse kaiware » et une sélection de desserts servis dans une boîte Bento qui la laisseront sans voix (mention spéciale pour le « Semi-pris de kumquat et son écume, crémeux et croustillant chocolat », chef d’œuvre de technique et d’harmonie des saveurs).
Un sacré périple en quelques heures. De superbes découvertes, sur la table carrée bien sûr, et une plus belle encore de l’autre côté.
Ozu
Jardins du Trocadéro
5, avenue Albert de Mun
75116 Paris
Téléphone : 01 40 69 23 90
Ouvert tous les jours
Menus Déjeuner de 22 € à 39 € (en semaine)
Menu Suggestion à 72 €
A la carte, comptez entre 50 € et 80 € (Crabe mou : 18 €)
Plus de photos d’Ozu, ici.
Union Libertine, Yeah! Que de la balle que tu es:)!Toi..., dis-doux, dis-donc;)!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!:))))))))))))))))))))))))))))))))))))))))))))))))))))))))))))))))))))))))))))))))))))))))))
Rédigé par : Sand | 19 juillet 2008 à 12:16
http://fr.youtube.com/watch?v=2KkarMNlTzY
Rédigé par : Sand | 19 juillet 2008 à 12:26
Le mystère du "elle" éclipserait presque les saveurs de l'Ozu tant ta chronique laisse en suspens ! Comme d'habitude, ta plume fait vagabonder l'esprit ;-)
Rédigé par : Aude | 19 juillet 2008 à 13:57