Pour un peu, cela vous tirerait les larmes, comme un enterrement de grands-parents, une maison de famille soudainement vidée de ses souvenirs. A 65 ans, après cinquante ans de vie plus qu’active, le patron du Relais Beaujolais s’est retiré, le restaurant a fermé définitivement ses portes un sale matin pluvieux pour être finalement remplacé par une « boîte brésilienne », cela ne s’invente pas…
Voici plus de vingt ans que cette adresse régalait les francs appétits du 9ème. Plus de vingt ans que cette auberge (il n’y a pas d’autre mot) échappait aux sauts de cabris de la mode parisienne. On en poussait la porte comme on remontait le temps et l’espace. L’ambiance du Relais Beaujolais c’était back in the fifties et direction la province des départementales. Un décor d’auberge de campagne donc, celle des films de Fernandel, Oury et Bourvil, mi-chasse, mi-plouc. Un grand bar à l’entrée devant un mur de lambris orange, des voilages en dentelle, une grande salle aux vieilles chaises paillées, un énorme pressoir pendu au plafond, quelques outils agricoles au mur, du gibier empaillé partout (faisan, perdreau, canard…), deux lustres en fer forgé, des tables dressées aux nappes saumonées, des reproductions de natures mortes, une carte immense des crus de Beaujolais, tout ici contribuait à créer une atmosphère de temps arrêté entre les voies d’un passage à niveau désaffecté.