Drôle d’impression en sortant du Harry’s Bar, celui-là même où Cipriani fils inventa le Carpaccio pour la Comtesse Amalia Nani Mocenigo en 63 et où le père affuta son Bellini en 48, pêches blanches et Prosecco di Conegliano. Le bar « mythique » fréquenté par Hemingway, Orson Welles et Bogart. On y est comme au théâtre. Le décor d’une banalité désolante est bien planté dans son acajou d’origine, les serveurs empapillonés s’activent en un ballet mécanique bien rôdé et les clients se regardent ébahis en se disant « j’y suis, j’y suis ». Mais tout cela sonne faux, comme une mauvaise pièce de boulevard. On baille en attendant la fin du spectacle et on se demande comment certains endroits ont pu à ce point perdre leur âme. Du coup, on boit notre Bellini (15 €), sans doute le millième servi dans la journée, trop doux et pas assez glacé à mon goût, avec un peu de tristesse. Pour sûr, le vieil Ernesto n’y retrouverait pas ses petits.
Harry’s Bar
Sestiere San Marco, 1323
041 528 57 77
Nourritures tarifées au pic à glace, service en pilotage automatique